Pour vous, qui suis-je ?

                 Homélie du 21ème dimanche  A : « Pour vous, qui suis-je ?« 

                Lectures : Is 22, 19-23; Ps 137; Rm 11, 33-36; Mt 16, 13-20

Mes sœurs et mes frères, Jésus fait une étude qualitative, un sondage d’opinion : il  veut savoir quelle est la représentation que les gens se font de lui.  N’est-il pas vrai que  la question de son identité taraude l’homme depuis maintenant 20 siècles ? Y répondre,  c’est donner du contenu et de la  pertinence à sa foi.

Résultats de l’enquête auprès des disciples : l’opinion des gens qu’ils côtoient sur les marchés, dans les rues,  les villages, les villes,  … concernant Jésus est certes variée, diverse dans les détails, mais dans le fond elle est unanime : Jésus  n’est pas un homme ordinaire.  C’est un envoyé de Dieu assimilé  aux  célèbres prophètes de la tradition biblique  comme Jean-Baptiste, Elie, Jérémie…  De toute évidence,  un tel sondage  à l’heure actuelle donnerait des résultats tout aussi différents !

Curieux ! Jésus ne fait aucun commentaire de cette opinion de masse : il ne dit pas qu’elle est juste, fausse ou insuffisante. Comme si ce qui importe pour lui, ce n’est pas de ressasser ce que les autres disent, mais la conviction de chacun à son sujet; ce que   chacun ressent quand il invoque son Nom. « Et pour toi, que dis-tu, qui suis-je ? » Voici l’heure de la vérité : devant le miroir de sa conscience, chacun est invité à répondre en « je« , à mettre des mots sur son attachement à Jésus…  Ce n’est pas nécessairement évident quand on sait qu’il est parfois difficile de justifier son amour à l’autre : le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas !

Sur ce, Simon-Pierre répondra : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant« . Remarquez que c’est la même profession de foi que celle des disciples dans la barque d’il y a 2 semaines,  quand Jésus marche sur l’eau : « Tu es vraiment le Fils de Dieu » (Mt 14, 33). Tout comme notre foi, la parole « illuminée » de Pierre ne relève pas  d’un raisonnement humain, c’est plutôt une inspiration divine, une révélation intérieure : Jésus est le Christ, le Messie, l’envoyé de Dieu qui a reçu l’Onction, c’est-à-dire qui est conduit par l’Esprit Saint; qui m’aime, me  pardonne et me libère ! Et Jésus de bénir et de béatifier  Pierre en déclarant faire dorénavant  de lui le  « roc » sur lequel il bâtira lui-même SON Eglise ! C’est donc du solide, l’Eglise,  les forces de la mort n’auront point raison d’elle.

Chers amis, faut-il encore le souligner, c’est nous tous, chacun avec ses dons, ses charismes mais aussi ses pauvretés offertes, qui sommes les pierres vivantes de la construction de la nouvelle Cité de Dieu,  son Royaume à naître, où se vivent les valeurs évangéliques.

Pierre reçoit alors les clés (comme  Eliakim dans la 1ère lecture) : quand on va en vacances, c’est à un ami que l’on confie les clés de sa maison parce qu’on lui fait confiance.  Pierre peut dorénavant ouvrir la porte du Royaume à ceux qui le souhaitent. De même, à l’installation d’un nouveau curé nommé par l’Evêque dans une Unité pastorale, il y a un rituel de la remise des clés. Les clés symbolisent le pouvoir,  qui n’évoque  rien d’autre dans l’Eglise que le « service ». Le pape, successeur de Pierre,  n’est pas le tout-puissant, mais le serviteur des serviteurs. La charge qui lui est assignée, c’est de poursuivre, en collégialité avec les autres apôtres (Evêques) et fidèles, la mission de Jésus-Christ et d’agir en son Nom. En outre, le mandat de lier et de délier qui lui est octroyé, c’est la délégation que Dieu lui donne de pardonner les péchés en son Nom, la mission d’être le reflet de sa Miséricorde. Ce pardon guérit; il dénoue les nœuds de nos blessures et de notre impuissance d’aimer en vérité.

Notons par ailleurs que ce n’est pas à cause de ses mérites que Pierre reçoit cette procuration, mais c’est par  la grâce de Dieu. Dieu a fait le pari de la confiance en conférant la responsabilité de son Eglise à des disciples comme Pierre;  en demandant à des gens comme toi et moi de travailler à sa Vigne; nous qui,  comme Pierre, sommes capables de vaciller dans la foi, de douter, de décevoir, de le renier même ! Nous qui, toutefois,  l’aimons quand même. Tenez, Jésus ne demande pas  à Pierre s’il a les qualités requises pour le servir… il lui demande simplement s’il l’aime : « Pierre, m’aimes-tu ?Seigneur, tu  sais tout, tu sais que je t’aime » (Jn 21, 17) ! Notre force et notre assurance, c’est que  le Christ nous accompagne : « Sachez-le : je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps« (Mt 28, 20).

                                                                                    Vital Nlandu, votre curé-doyen

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