Mes sœurs et mes frères, se laisser faire ne serait-il pas un signe de faiblesse et de naïveté, une lâcheté qui cautionne les injustices ? Qui fait l’âne, doit-il s’étonner que les autres lui montent dessus ? En responsabilité civile, la justice réparatrice stipule que lorsqu’on a été lésé, on est en droit de réclamer d’être dédommagé. « Si quelqu’un t’a mordu » dit un proverbe africain, « c’est pour te rappeler que tu as aussi des dents« . La vengeance est un instinct naturel, qui est parfois spontané et inconscient.
Cependant, depuis les temps les plus anciens, la logique des représailles a toujours généré des rapports tendus et conflictuels, incitant à répondre au mal de manière brutale et inflexible. Chez les juifs, avant la loi du Talion, ce qui prévalait, c’était la démesure de la vendetta intempestive (Gn 4, 23-24). Tu me casses une dent, et si jamais je suis le plus fort, je te brise la mâchoire ; tu m’insultes, et si jamais je suis impitoyable et féroce, je sors mon couteau pour t’égorger. Etant donné ces débordements, pour éviter le chaos, il devenait urgent de trouver un coefficient de proportionnalité : le châtiment doit être proportionné à l’offense. Aussi, la législation hébraïque opta pour la loi du Talion : « Œil pour œil, dent pour dent », autrement dit ni plus ni moins, coup pour coup, insulte pour insulte, brûlure pour brûlure (cf. Ex.21, 23-25) ! Cette conception archaïque du droit a inspiré la logique de la peine de mort encore de mise dans certains pays comme les USA, l’Iran, l’Arabie Saoudite… Mais l’expérience montre que répondre au mal par le mal n’arrête pas le mal, loin s’en faut. La haine et la violence sont toujours un échec. De la même manière qu’une chemise blanche tachée de sang ne redevient pas blanche si on la trempe dans un bassin de sang… Et puis, répondre à la barbarie par la barbarie, n’est-ce pas trahir les valeurs au nom desquelles on se bat ? A. Camus l’exprime en ces termes : « Chaque fois qu’un opprimé prend les armes au nom de la justice, il fait un pas dans le camp de l’injustice ».
D’où cette question lancinante : comment sortir de la spirale infernale du déferlement de la haine, cette plaie qui défigure l’humanité depuis les origines ? Voici la réponse de Jésus : « Vous avez appris qu’il a été dit : œil pour œil, dent pour dent. Eh bien ! moi je vous dis de ne pas riposter au méchant ; mais si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui encore l’autre » (Mt 5, 38-39). Bien entendu, le conseil de Jésus ne s’applique pas à la lettre. Il ne nous invite pas à nous laisser tondre la laine sur le dos comme le mouton ou à faire le gros con en nous résignant à subir des outrages sans réagir. Lui-même n’a pas osé présenter l’autre joue lorsqu’un soldat impertinent lui flanqua une gifle au moment de sa Passion. Mais calmement et dignement, sans se laisser écrabouiller, il a voulu faire entendre raison à son agresseur, l’aidant à se remettre en question : « Si j’ai dit quelque chose de mal, montre-moi en quoi ; mais si ce que j’ai dit est juste, pourquoi donc me frappes-tu ? » (Jn 18, 23). « Présenter l’autre joue », c’est présenter un autre visage que celui du vengeur justicier, le visage de la non-violence. Ce que Jésus nous suggère, c’est vaincre le mal par le bien, la haine par l’amour (Rm 12, 21). Autrement, avec l’œil pour œil, on finit tous aveugles ! On le sait, la haine n’apaise pas la souffrance, elle l’entretient au contraire. Un cœur qui brasse rancœur, répulsion et ressentiment n’est pas en paix ; il vit un enfer. Les apôtres de la non-violence comme Gandhi, Martin Luther King, Nelson Mandela, le Dalaï-Lama et tant d’autres ont toujours cru dur comme fer que, comme l’écrit Henry David Thoreau, « Il n’y a qu’un remède à l’amour, aimer davantage«
Aussi, être disciple de Jésus, c’est consentir à imiter son Père et notre Père (Ep 5, 1), qui n’agit pas envers nous selon nos fautes (Ps 102). Et l’imiter, c’est rechercher la sainteté (1ère lecture); c’est aimer de l’amour-agapè dont il nous aime, c’est-à-dire de manière toute pure, désintéressée, détachée, gratuite et inconditionnelle. En effet, l’amour-agapè est parfait, achevé, accompli. Il pose notamment l’acte le plus puissant qu’il soit donné à un homme d’accomplir, à savoir aimer y compris ses ennemis. La personne transformée de l’intérieur par l’agapè devient bienveillante. Elle acquiert cette maturité humaine et spirituelle qui lui permet de faire la distinction entre la faute à reprouver absolument et la personne qui l’a commise qui, cependant, garde sa dignité de frère, de sœur en humanité et son droit à l’amour.
Chers amis, puisque chacun de nous est un sanctuaire de Dieu, une demeure de l’Esprit Saint (2ème lecture), c’est à l’amour-agapè que Dieu nous convie.
Lectures : Si 15, 15-20 ; Ps 118 ; 1 Co 2, 6-10 ; Mt 5, 17-37
Mes sœurs et mes frères, la page d’Evangile d’aujourd’hui montre bien le mouvement de ce que les théologiens appellent « l’économie du salut », c’est-à-dire l’évolution du plan de Dieu et sa réalisation, pour le salut des hommes, tout au long de l’histoire. Nous lisons : « Il a été dit jadis… Eh bien ! moi, je vous dis aujourd’hui« .
En effet, l’Evangile de saint Matthieu s’adresse principalement aux nouvelles communautés chrétiennes venues du judaïsme. La question fondamentale qui prévaut, c’est de faire ressortir la griffe de la nouveauté apportée par Jésus-Christ. Faut-il, somme toute, conserver les anciennes coutumes et lois, continuer de circoncire les enfants par exemple, de respecter le sabbat, de ne manger que l’alimentation « casher » …? Les antagonismes entre les anciens et les modernes, les tradis et les progressistes furent à bien des égards l’objet de la convocation du premier concile de l’Eglise (Ac 15). Et la controverse se poursuit de nos jours : tout dernièrement encore, on a longuement comparé feu le pape Benoît XVI avec le pape François. Et même hors de l’Eglise, le débat sur la diversification croissante des attitudes, des valeurs et intérêts des différentes strates d’âge, ce fameux « conflit des générations » est omniprésent au travail, en politique, dans les familles… Quant à lui, au lieu d’une rupture totale, Jésus plaide pour un continuum, une dynamique de l’économie du salut. Le Nouveau Testament a été greffé sur le vieil olivier de l’Ancien Testament, et toute la Bible est nourrie par la sève de l’Esprit Saint ; elle fleurit en Jésus-Christ. Aussi, puisque Jésus n’abolit pas l’ancienne loi, mais qu’il l’accomplit en lui donnant tout son sens, c’est à partir des lunettes de son Evangile qu’il convient d’interpréter les textes bibliques.
Dans la 2ème lecture, saint Paul souligne qu’il s’adresse aux chrétiens « adultes » dans la foi, autrement dit, qui savent ce qu’ils font et pourquoi ils le font. Chers amis, ces chrétiens-là, c’est vous aujourd’hui, car vous n’êtes pas des marionnettes, mais des femmes et des hommes libres et responsables. C’est pour que nous soyons libres que le Christ nous a sauvés (Ga 5, 1). La 1ère lecture fait écho à cette liberté : « Si tu le veux, tu peux respecter les commandements ; il dépend de ton choix de rester fidèle. Tu as devant toi l’eau et le feu, la vie et la mort : choisis ce que tu préfères« .
Souvent j’entends dire : « Moi je n’ai pas besoin de me confesser. Je ne tue pas, je ne vole pas, je n’ai pas d’ennemi. Je suis en règle, je fais ce que je dois faire« . Ok, c’est bon tout ça, mais ce sont là des actes « extérieurs » dont s’occupe principalement la justice des hommes. La justice de Dieu se préoccupe plutôt du for intérieur, du tribunal de la conscience, du secret du cœur, des intentions profondes de chacun. De fait, l’homme peut faire n’importe quoi en ce qui concerne par exemple l’affectivité, pourvu que cela soit motivé par de bonnes intentions. « Aime » écrit saint Augustin, « et fais ce que tu veux« … Antoine Nouis raconte qu’un jour, un père du désert chemine sur une route avec son disciple lorsqu’ils croisent une très jolie femme montée sur un âne. Le vieillard lève sur elle un regard admiratif tandis que son disciple garde son regard sur ses chaussures, de peur de succomber à la de convoitise. Quelques kilomètres plus loin, le disciple interroge son maître : « Pourquoi as-tu donc posé les yeux sur cette jolie femme ? » Réponse : « Tu vois, cette dame t’a charmé, tu penses encore à elle. Tu l’as regardée comme une source de tentation, alors que moi je l’ai regardée comme une des merveilles de la création de Dieu! « …
Tout dépend finalement de la bienveillance du regard et des visées que l’on cache au tréfonds de soi, et c’est particulièrement le cas quand il s’agit de la vertu de donner.
L »important n’est pas ce que l’on donne, mais l’amour que l’on y met. Il y en a qui donnent pour s’afficher, pour enchaîner celui qui reçoit (« Malgré ce que j’ai fait pour lui, voilà ce que j’en reçois« ), pour faire du troc affectif, ou encore pour se dédouaner en conscience. Quand on donne avec une arrière-pensée de retour, le don est stratégique et manipulateur… D’autres donnent de leur superflu. Sur ce, le pape François écrit : « Je me méfie des dons qui ne coûtent rien au donateur« .
Chers amis, que par la grâce de cette eucharistie, Dieu nous donne de vivre pleinement dans la liberté des enfants de Dieu, et d’être des femmes et des hommes responsables de l’alliance de leur baptême.
Lectures: Is 58, 7-10; Ps 111; 1 Co 2, 1-5; Mt 5, 13-16
Mes sœurs et frères, dimanche dernier, Jésus a inauguré sa mission en présentant les Béatitudes. Ce sont les perles, les valeurs spirituelles et profondes qui spécifient le vrai bonheur de l’homme. Dans la page d’Evangile d’aujourd’hui, il poursuit son discours sur la montagne en donnant deux caractéristiques identitaires du disciple : celui-ci s’insère dans l’épaisseur du monde en y étant à la fois salé et lumineux.
C’est une immense responsabilité mais aussi un grand honneur qui lui sont attribués !
L’usage du sel est multiple. En RDC, j’ai vu des paysannes venir le samedi au marché, vendre les produits de leur travail aux champs, que l’on achète d’ailleurs à vil prix. Et quand elles ont un peu d’argent, la première chose qu’elles font, figurez-vous, c’est acheter du sel. Pourquoi ? Parce que le sel est un condiment qui assaisonne, donne goût et saveur à la nourriture, rehausse l’harmonie d’un plat.
Alors, si le sel se dénature, si toi chrétien ami, frère et sœur de Jésus-Christ, tu t’affadis ; si tu n’es plus authentique, cohérent avec ta foi, comment peux-tu encore donner la saveur de la confiance au monde ?
Comment peux-tu donner le goût de l’espérance aux visages blafards qui, dans la banalité, la routine et la grisaille quotidiennes, déclarent leur vie et même la Vie absurde en se réfugiant dans les » A quoi bon! «
Si ton témoignage de chrétien est insipide, incolore, inodore, comment peux-tu encore être attractif, donner aux autres l’envie de chercher Dieu et de croire en Lui ?
Dans les civilisations sans réfrigérateur, le sel permet de conserver les aliments, les denrées périssables (comme le poisson en Afrique). Ainsi es-tu appelé, avec les moyens qui sont les tiens, à empêcher ta famille, tes amis de pourrir spirituellement. Tu es appelé à aider les autres, en l’occurrence les jeunes en recherche, à ne pas se perdre.
Et puis, dans certaines cultures d’Orient, le sel était un symbole d’alliance entre les hommes. Manger du sel avec quelqu’un, c’était sceller un pacte d’amitié avec lui, le pacte du sel étant indissoluble. De même, le sel est signe d’alliance et de fidélité des hommes avec Dieu (Nb 18, 19). Aussi, es-tu convié à promotionner la paix entre les hommes et avec Dieu.
Cependant, tout excès nuit. Il faut de la modération en tout. Une soupe trop salée est immangeable ! Les terres à haute teneur en sel (salinisation des sols) deviennent stériles, rien n’y pousse.
Autre métaphore forte de l’Evangile de ce dimanche : Vous êtes la lumière du monde !
Sans lumière, on végète dans l’obscurité ; on est dans l’insécurité : un serpent peut te mordre au talon et des voleurs dévaliser ta maison. Jésus nous demande de ne pas cacher la lumière, ni de plonger la tête dans le sable comme l’autruche, mais d’être lumineux, de briller simplement et sans artifice devant les hommes.
Sans lumière, il n’y a pas de repère. Comme éclaireur, tu es appelé à être la lanterne, le grain de lumière qui balise l’océan du monde.
Sans lumière, nulle couleur, nulle beauté : tu es ainsi convié à révéler avant tout la beauté intérieure des autres, à les valoriser par ton regard bienveillant, ton a priori positif … »En tout homme, il y a plus des choses à admirer qu’à mépriser » (A. Camus).
Sans lumière, nulle vie (photo-synthèse) : tu es appelé à être donneur de vie, de joie de vivre et d’aimer, rien que déjà par la bulle d’oxygène qui éclate de ton sourire !
Sans lumière, pas d’énergie renouvelable, de panneaux photovoltaïques : tu es appelé à booster ceux qui sont fatigués et découragés…
Cependant, tout excès nuit. Il faut de la modération en tout. Trop de lumière aveugle et éblouit le regard ! Tu n’es pas le soleil ou encore une star, mais le reflet de l’Amour infini de Dieu. Puisque tu as reçu, donne humblement.
Et enfin, ce qui est prometteur et encourageant à témoigner de la lumière évangélique, c’est de savoir que la victoire est déjà remportée. Car le propre de la lumière est de s’imposer : lorsqu’elle rencontre l’obscurité, c’est cette dernière qui est éclairée, la lumière, elle, ne s’enténèbre pas… Alors, debout peuple de lumière, baptisé prophète pour annoncer les merveilles de Dieu.
Lectures : Is 8, 23b-9,3; Ps 26; 1 Co 1, 10-13. 17; Mt 4, 12-23
Mes frères et mes sœurs, nous sommes en pleine semaine de prière pour l’unité des chrétiens et la 2ème lecture de ce dimanche vient à point nommé. En effet, cette lecture nous révèle un mal profond et affligeant qui ronge la communauté de Corinthe : le démon de la division. Il y en a qui se réclament de Paul, fondateur de la communauté, d’autres d’Apollos, le brillant savant versé dans les Écritures (Ac 18, 24) ou de Pierre, en l’occurrence les chrétiens de tendance judaïsante. D’autres encore du Christ, ceux qui ne se réclament d’aucune école et essaient de s’en tenir à l’essentiel… La démarche de la prière pour l’unité des chrétiens est un appel à faire corps et signe, à accueillir l’autre dans sa particularité et à dépasser les peurs. Le témoignage de notre unité repérable relève, selon saint Jean, de la cohérence de notre appartenance au Christ (Jn 13, 34-35). L’indifférence, la méfiance, le poison de la comparaison, la mémoire douloureuse du passé, nos retranchements doctrinaux, notre fixation aveugle et autarcique sur les règles et les rituels nous ont tellement séparés. Pour le cardinal Jozef De Kesel, « L’unité n’est possible que lorsque nous nous aimons et nous apprécions les uns les autres. L’amour est le véritable moteur de l’œcuménisme« … Ceci dit, comprenons-nous bien : nous ne prions pas pour la fusion ou l’unification des chrétiens, mais bien pour l’unité dans la diversité de leurs différentes approches et lectures de la foi chrétienne !
Quant à elle, la 1ère lecture évoque la terrible déportation de 721 av. J.C. Le Royaume du Nord – la Galilée – est conquis par les Assyriens. Le peuple est humilié, rabaissé. On crève même les yeux aux déportés. Aussi Isaïe prophétise-t-il : le peuple qui marchait dans les ténèbres du désespoir et de l’ignorance a vu poindre une grande lumière. C’est un cri d’espérance qui, pour le philosophe protestant Paul Ricoeur, est « l’optimisme qui a connu les larmes« !
Selon saint Matthieu, la parole d’Isaïe s’est pleinement réalisée en Jésus-Christ. La page d’Évangile de ce dimanche nous y renvoie. Après son baptême dans le Jourdain et l’arrestation de Jean Baptiste, Jésus prend la relève. Quittant ainsi le village de son enfance, il déménage dans le Nord de la Judée, précisément en Galilée, carrefour des routes, des étrangers, loin de Jérusalem dite la Sainte Ville. Et là, il choisit de s’installer dans la bourgade appelée Capharnaüm, sur les rives du lac de Galilée. Il y établit son quartier général. Voici donc Jésus faire de la pastorale des périphéries : et toi, quels sont tes reflexes vis-à-vis des périphéries modernes, où vivent des gens presque « mal vus », qui ne pensent pas, ne prient pas, ne se comportent pas comme toi, bref des gens différents ? En fait, si Jésus choisit la Galilée comme première étape de son ministère pastoral, avec sa population toute brassée et cosmopolite, c’est pour signifier que la mission est universelle : la Bonne Nouvelle est destinée à tous les hommes de la Terre. Et pour la continuité de l’œuvre, il commence par l’essentiel du message de Jean Baptiste : puisque l’Amour t’est révélé et que tu te sais aimé de Dieu, convertis-toi, autrement dit, retourne-toi et reviens vers Dieu. Comment ? En acquérant un regard bienveillant, positif vis-à-vis de toi-même, de l’autre, de la nature et de Dieu. Chers amis, notre vie chrétienne ne serait-elle pas ce re-tournement perpétuel ?
Jésus recrute alors ses premiers collaborateurs, il en a besoin pour travailler avec eux, comme témoins, à la construction du Royaume de justice et de paix. La mission qui leur est assignée, qui t’est ainsi confiée, est de « pêcher » les êtres humains, c’est-à-dire de les tirer de la mer pour les empêcher de se noyer dans les flots des forces du mal et de la mort. Sa méthodologie pastorale, c’est enseigner, proclamer et guérir. En effet, la parole seule ne suffit pas, encore faut-il, pour la rendre crédible, l’accompagner par des actions concrètes de compassion et d’entraide : il y a tant de plaies à panser, de victimes d’injustice à défendre, de découragés à stimuler, de naufragés de la vie à secourir.
Mais avant de confier la mission à ses disciples, Jésus leur a dit : « Venez derrière moi« . Tant qu’il nous devance, nous savons que nous sommes en sécurité. Notre chemin est illuminé de son éclat, qui nous aide à discerner la route à suivre.
Mes sœurs et mes frères dans le Christ Jésus, Noël est l’événement qui a changé la face du monde et qui, près de 2000 ans après, remuant les hommes et les femmes de toute la terre, parle au cœur de tous, que l’on soit croyant ou non. Il s’agit de la naissance d’un enfant ! En effet, il n’y a rien de plus faible, de plus fragile qu’un bébé nouveau-né, mais aussi rien de plus beau, de plus prometteur d’avenir. Chaque naissance d’un enfant est une entrée en espérance, une nouvelle humanité qui surgit !
Oui, Noël parle au cœur de tous tant il est ouvert à l’universel. Ce n’est pas seulement une fête religieuse, tout le monde y participe, quelles que soient ses opinions philosophiques. Le charme de Noël, n’est-ce pas son effervescence magique au cœur de l’hiver, ses décorations, ses cadeaux en habit de fête ? Les cadeaux sont d’abord des signes d’affection et d’attachement qui apportent la joie, une manière de dire son amour aux personnes que l’on aime.
Spirituellement parlant, la grâce de Noël éclaire nos lanternes en nous éveillant aux signes du Royaume. Noël est une opportunité pour certaines familles de se retrouver, de fêter ensemble, de raffermir leurs liens et, le cas échéant, de se réconcilier… En ce qui nous concerne, pour nous préparer à fêter Noël, nous avons vécu en Unité Pastorale, un mois de décembre riche en expériences spirituelles. Beaucoup d’entre nous ont participé, cette année encore, au festival d’adoration à l’occasion de la fête de l’Immaculée Conception. Beaucoup ont voulu faire partie de ces bergers témoins de la naissance du Christ, qui reconnaissent le visage de Dieu dans les plus petits d’entre nous. Le pape François nous le souhaite en ces termes : « Que Noël soit pour vous tous une occasion de fraternité, de croissance dans la foi et de gestes de solidarité envers ceux qui sont dans le besoin« . C’est dire que Noël est une révolution d’amour et de tendresse. Je rends grâce à Dieu pour le foisonnement d’idées et d’initiatives de partage de la joie de Noël dont j’ai été témoin. Nos paroisses ont participé généreusement à la collecte de l’Avent de Vivre Ensemble. Les communautés paroissiales de Bellevaux, de Ligneuville, de Xhoffraix ont écrit des cartes aux personnes qui vivent seules. C’est un geste d’attention qui est en soi un baume versé sur tant de plaies. Quant à elle, la paroisse de Malmedy a préparé plus ou moins 150 petits montages de Noël que nous sommes allés apporter en MRS, avec notre sourire, notre écoute empathique et notre regard bienveillant. Comme dit le dicton, « Celui qui n’a pas Noël dans le cœur ne le trouvera jamais au pied d’un sapin« .
Là, en MRS, nous avons rencontré d’autres personnes actrices d’un monde meilleur. Comme nous, ces personnes, entre autres les enfants qui ont chanté pour nos aînés, tenaient à leur apporter une part de soleil. J’ai d’ailleurs chaleureusement félicité ces jeunes. La graine de l’engagement social se plante très tôt. Je lis ceci dans la carte qui accompagnait le montage de Noël : « Que Jésus vienne habiter votre cœur, qu’il vous accompagne, spécialement dans vos moments de solitude et de souffrance. La paroisse de Malmedy« . Aussi, avec nos actions collectives, individuelles, connues et inconnues, des actions somme toute menées sur base du sacrement du frère, nous avons été un maillon d’une chaîne de fraternité.
Chère amie, cher ami, pourquoi Dieu choisit-il de se compromettre dans la réalité profane de la chair humaine, pourquoi choisit-il de devenir homme; pourquoi choisit-il d’être dorénavant lié à ton histoire ? C’est pour qu’à ton tour, tu naisses à la vie divine; que tu trouves dans ta vie sa Présence ! Il veut se servir de tes mains pour soigner les autres, de tes oreilles pour les écouter, de tes yeux et de ton intelligence pour voir les injustices, de ta bouche pour défendre ceux qui sont muselés, de ton cœur pour aimer les pauvres en quête d’amour…
L’Enfant qui est né est Prince – de – la – paix, la paix qui respecte la liberté humaine. Pensons à ces peuples en Ukraine, au Yémen, en Syrie, en Arménie, en RDC, qui passent Noël sous le feu crépitant des armes et des bottes de soldats, ces peuples en guerre, victimes des atrocités qui défigurent le visage de l’humanité. De mon point de vue, la manière la plus opérante et la plus appropriée de s’indigner contre la folie meurtrière des hommes, c’est de se résoudre à devenir soi-même un artisan de paix, une femme et un homme ardent à faire le bien. Pour ce faire, il convient que nous fassions d’abord la paix avec nous-mêmes : personne ne donne ce qu’il n’a pas. Faire la paix avec soi-même, c’est se connaître, être connecté à son espace, à son puits intérieur en demandant à l’Esprit Saint de le remplir d’Amour ; c ‘est s’accepter et s’aimer tel que l’on est. Bref, c’est dégeler la source d’eau vive qui dort en soi, rallumer son étoile pour égayer les autres de sa lumière, de sa paix et sa tendresse.
Que la grâce de Noël nous aide à oser refaire confiance ; à oser regarder autrement les autres, le monde ; à oser être attentif à l’appel de notre entourage sans nous sentir indispensable ; à oser aimer davantage… Qu’elle inonde nos cœurs de la paix spirituelle. A tous et à chacun, je présente mes vœux les meilleurs !