Homélie du 5ème dimanche ord B : Une journée de Jésus !
Lectures Jb 7, 1-46-7; Ps 146 (147 a); 1 Co 9, 16-19. 22-23 ; Mc 1, 29-39
Mes sœurs et mes frères, dans le texte d’Evangile de ce dimanche, saint Marc nous présente la journée-type de Jésus, son agenda surchargé : dès l’aube, prière intime, personnelle ; prière communautaire et enseignement à la synagogue ; pastorale de la santé et exorcisme (délivrance) pour guérir les cœurs brisés et soulager la détresse humaine (1ère lecture) ; rencontres et écoute des préoccupations des gens.
Les amis, dans notre monde moderne, néo-libéral, nous vivons à bien des égards dans un rythme de vie effréné : agendas débordants, pression sociale, boulimie de travail y compris pastoral. Il y a des prêtres, des laïcs engagés qui se demandent à juste titre si la vie consacrée à Dieu et à l’Eglise ne consiste qu’à manager, à organiser, à faire encore et toujours, à courir sans cesse. Savez-vous, il n’y a jamais eu autant qu’aujourd’hui de diagnostic de burn-out, de consommation de psychotropes. Il faut par exemple s’armer de patience pour avoir un rendez-vous médical chez un psychiatre.
C’est ici que l’exemple de Jésus est inspirant : avant de commencer sa journée, il éprouve un besoin impérieux de se retrouver seul, dans un bain de silence, pour sa paix intérieure, la respiration de son âme. Pourquoi ce besoin de quiétude et de solitude ?
En effet, le silence pousse au désert intérieur, il ouvre à l’invisible, à la lecture de sens, à l’émerveillement, à la prière … Jésus va ainsi au désert, lieu de privation, de dépouillement, de mise à nu de l’individu : on y est face à son propre destin… « Ce qui embellit le désert, c’est qu’il cache un puits quelque part » (Antoine de Saint Exupéry). Ce puits, n’est-ce pas un puits de grâces ? Jésus y va pour prier, se ressourcer, s’imprégner à la source de l’amour et consacrer le monde à Dieu.
Alors, pour ton hygiène de vie humaine et spirituelle, ne convient-il pas d’apprendre à ralentir, à faire une halte, à respirer ? Et si chaque jour, tu prenais au moins 15 minutes de silence, de détachement, de lâcher-prise pour te perdre en toi, retourner dans ta crypte intérieure, secrète, spirituelle. Tu te réapproprieras le sanctuaire divin bâti au plus intime de toi. Ce sanctuaire, c’est le temple dont parle saint Paul : « Ne savez-vous pas que vous êtes un temple de Dieu, que l’Esprit Saint habite en vous ? » (1 Co 3, 16). S’y poser et reposer est le secret d’apaisement, d’ataraxie … « A l’intérieur de nous-mêmes » écritMaurice Zundel, « Dieu ne cesse de nous attendre » On gagne ainsi à (re)découvrir son monde intérieur !
Dans la page d’Evangile, Jésus guérit la belle-mère de Simon qui, sitôt que Jésus a saisi sa main, s’est levée et s’est mise à les servir. Le verbe « se lever » (se remettre debout physiquement et moralement) a une consonance résurrectionnelle, et le verbe « servir » une nuance diaconique. Chers amis, si Dieu nous remet debout, s’il nous donne le souffle de vie, la santé encore aujourd’hui, c’est sans doute pour que nous continuions d’être utiles aux autres.
Et puis, cette autre considération d’Evangile m’interpelle : Jésus s’étant retiré au désert, les gens le cherchent. Par sa réponse : « Allons ailleurs, dans les villages voisins, afin que là aussi je proclame l’Evangile« , il leur fait comprendre que loin de se confiner dans le confort des clubs ou des cercles privés, il faut élargir l’horizon de la mission « universelle ». Autrement dit il convient de prêcher « l’Heureuse Nouvelle » jusqu’aux périphéries, chez les inconnus et même les sceptiques, les indifférents. Saint Paul le dit sans détours : « Evangéliser est une nécessité qui s’impose » (2ème lecture)… Que dire alors de notre société sécularisée ; de nos paroisses devenues paroisses des « cheveux blancs »; que dire de l’éloignement de nos enfants et petits-enfants des églises ?
Toujours est-il que nous sommes, en ce qui nous concerne, responsables de ce que nous semons et non de ce qui pousse, tout en sachant que de tout témoignage évangélique, il en reste toujours quelque chose !
Vital Nlandu, votre curé-doyen


