Homélie du 14ème dimanche ord B : Tenez bon !
Ez 2, 2-5 ; Ps 122 ; 2 Co 12, 7-10 ; Mc 6, 1-6
Mes sœurs et mes frères, dimanche dernier nous avons eu le témoignage de foi de Jaïre au Dieu de l’impossible. Et après avoir relevé sa fille, Jésus a ordonné qu’on lui donne à manger. Si le vivant se nourrit de nourriture, le baptisé se nourrit de l’eucharistie. C’est la raison de notre présence en cette cathédrale où le Seigneur nous convie à la table de sa Parole et à celle du Pain de vie. Sauf qu’aujourd’hui, le décor change : nous passons du témoignage de la foi à l’incrédulité.
Dans la 1ère lecture, le prophète Ezéchiel est envoyé auprès d’un peuple rebelle qui se détourne de Dieu. Le même son de cloche retentit dans la page d’Evangile : Jésus lui-même est voué à un cuisant échec dans son propre village. Le point culminant de ce revers est la croix : il y est pendu par rejet ! Cela est confirmé dans le prologue de l’Evangile de Saint Jean : » Il est venu dans son propre pays, mais les siens ne l’ont pas accueilli » (Jean 1, 11). Et François d’Assise de renchérir : »L’amour n’est pas aimé » !
Certes, les compagnons d’enfance de Jésus tombent dans l’admiration. Ils admettent ses indéniables charismes : Jésus parle avec sagesse, il pose des actes de bonté, de guérison…, mais de là à reconnaître en lui le messie, ils ne parviennent pas. Tant qu’ils continuent de regarder ce charpentier bien ordinaire qu’ils ont connu d’une manière humaine, l’image qu’ils ont de Jésus reste à ras de terre ! En effet, au-delà des apparences, chaque être humain est tout autre ! Seul le regard sublimé, transfiguré, qui découvre l’étincelle divine en chaque personne, le perçoit.
Oui, Jésus le charpentier a dû travailler non seulement le bois, mais aussi des cœurs bien plus durs que le bois ! Et pourtant, il ne s’en offusque pas et ne force la main de personne. Il poursuit sa mission malgré le rejet… Voilà donc une leçon : avons-nous alors le droit de nous plaindre ou de dramatiser nos difficultés aujourd’hui à transmettre la foi ? Je pense aux acteurs pastoraux (prêtres, diacres, coordinateurs pastoraux, assistants paroissiaux, catéchistes) et à ceux qui sont associés au ministère d’ensemencement (parents, grands-parents, professeurs de religion…). Annoncer la Bonne Nouvelle aujourd’hui n’est pas une sinécure. Certains déchantent, se découragent face à l’indifférence de notre société aux choses de Dieu. Ce que je peux comprendre tant et si vrai que le constat est sans appel : les gens s’éloignent de plus en plus de Dieu. Nous vivons dans une société sécularisée, déchristianisée qui, même si certains ne sont pas nécessairement rebelles à Dieu, avouent gentiment qu’ils n’en ont pas besoin. Dites-moi, comment faire boire de l’eau à un âne qui n’a pas soif ? Comment partager le don de la foi, transmettre à ses enfants, à ses petits-enfants un héritage spirituel dont ils se fichent ?

Et pourtant, c’est dans ce monde postmoderne que Dieu nous envoie. Contre vents et marées, sans prosélytisme, mais avec respect, humilité et patience, nous sommes appelés à proposer aux gens le « goûtez et voyez comme est bon le Seigneur » (Ps 33, 9), à semer aujourd’hui plus que jamais la Parole, les valeurs évangéliques au milieu de broussailles.
Et mine de rien, la grâce qui se déploie dans la faiblesse, dans les pauvretés offertes et un dynamisme qui échappe à l’observation, fait son œuvre. Le Royaume de Dieu est comme un levain dans la pâte, une force discrète que rien n’arrêtera.
C’est tout aussi vrai que, parfois, on voit mieux certaines choses avec les yeux qui ont pleuré. Les épreuves, les échecs sont source d’humilité qui, étymologiquement parlant, vient de «humus», qui signifie terre féconde ! Ils nous prédisposent à plus d’abandon et de confiance en Dieu. Martin Luther raconte sa liturgie du coucher : « Je vais dans ma chambre et je jette les clefs aux pieds de mon Seigneur en lui disant : ‘Seigneur, c’est ton affaire et non la mienne. C’est sans moi que tu l’as conservée depuis le début du monde, sans moi tu peux bien la conserver jusqu’à l’éternité’« .
Comme qui dirait : tout est entre les mains de Dieu ! Il ne se lasse pas d’espérer la conversion de son peuple et il marche aux côtés de ceux qu’il envoie.
Vital Nlandu, votre curé-doyen


Tout simplement MERCI Vital, ce matin je lis cette homélie qui répond vraiment à un moment de vécu ! Ghislaine
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