Prier sans se décourager

Homélie du 29ème dimanche ord C
Lectures : Ex 17, 8-13 ; Ps 120 ; 2 Tm 3, 14-4, 2 ; Lc 18, 1-18

Mes sœurs et mes frères, la liturgie de la Parole de ce dimanche est hautement spirituelle. La 1ère lecture est une référence à l’école de la prière: tant que Moïse garde les bras levés, le bâton de Dieu à la main, Israël l’emporte ; lorsqu’il les abaisse, Amalec prend le dessus. Les mains levées de Moïse représentent la prière d’intercession. C’est un geste d’abandon, de confiance et de dépendance envers Dieu. Certes, c’est le peuple, c’est toi en l’occurrence, qui combats sur le terrain, mais la victoire ne vient pas de tes ressources ni de tes forces, elle vient du Ciel. C’est Dieu qui agit, ta participation à son œuvre, c’est ne pas baisser spirituellement les bras. La foi est un combat quotidien, une épreuve d’endurance!

Ce passage du livre de l’exode nous dévoile deux secrets:
*la clé de la victoire, c’est la persévérance dans la prière
*l’appui de la communion de cœur, le soutien fraternel est indispensable
Moïse fatigue et ses mains se relâchent. Il a besoin des autres. Aaron et Hour le soutiennent quand sa prière faiblit, quand sa foi s’essouffle. Oui, personne ne se sauve seul: nous avons besoin les uns des autres pour tenir dans la prière et la foi. Voilà pourquoi la prière communautaire, la messe, les groupes de prière sont si importants.

Chers amis, la prière, c’est la respiration de l’âme, une matière de rester en lien avec Dieu et de laisser son cœur se transformer en sa présence. Pour Martin Luther le réformateur, «Tout comme un cordonnier qui fait des souliers et un tailleur des habits, un chrétien doit prier : le métier du chrétien, c’est prier». Prier, même si parfois on a le sentiment que Dieu tarde à agir. Etre chrétien, c’est faire monter vers Dieu le cri de sa pauvreté: «Je lève les yeux vers la montagne d’où viendra mon secours. Le secours me vient du Seigneur qui a fait le ciel et la terre» (Ps 120)… A la fin de sa vie, quelqu’un demandait à Jean-Paul Sartre, le philosophe existentialiste athée qui souffrait des yeux, s’il craignait de devenir aveugle. Réponse: «Bien sûr … Mais à qui donc me plaindre? Le croyant, lui au moins, a quelqu’un devant qui il peut poser son cri!»

Dans l’extrait d’Evangile d’aujourd’hui, Saint Luc nous instruit sur la puissance de la prière persévérante. Et Saint Paul le rappelle: «Priez continuellement» (1 Th 5, 17). Cette prière transforme notre demande tenace en une rencontre, une relation vivante et confiante avec Dieu. Elle nous aide à demeurer en sa présence même quand rien ne change. C’est un véritable acte de foi en la Bonté de Dieu à qui je dis: «Je ne te lâcherai pas tant que tu ne m’auras béni» (cf. Gn 32,27).

Evidemment, ma prière n’ajoute rien à ce que Dieu est, mais elle me rapproche de Lui. Même si je n’obtiens pas sur l’heure ce que je demande, ma prière m’apprend la patience, la confiance et l’abandon. Elle purifie ainsi, raffermit et consolide ma foi. Frapper à la porte de Dieu, même sans rien n’entendre de l’autre côté, frapper à sa porte même quand Il semble se taire ou tarde à répondre, m’enseigne que son calendrier, que son temps à Lui n’est pas le mien.

Cela étant, je peux comprendre que son silence puisse dérouter et même décourager certains. Voilà pourquoi Jésus nous pose expressément cette question redoutable: «Quand le Fils de l’homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre?» Autrement dit: «Seras-tu encore là à prier, à espérer, à croire, à t’engager pour la mission   même si tu ne comprends pas tout, même si tu ne reçois pas tout?» D’où ma prière: «Seigneur, augmente ma foi!»

Il est aussi vrai que cette péricope d’Evangile me donne également à revisiter la représentation, la perception que je me fais de Dieu : ma foi n’est-elle pas qu’utilitaire? Est-ce que je n’invoque pas Dieu rien que pour ce qu’il me donne?

Sachons-le, chers amis: Dieu n’est pas un distributeur automatique, mais un Père à aimer d’abord pour lui-même et non pour ce qu’il offre. Saint François de Sales le dit en ces termes: «L’amour vrai prie sans se lasser, car il ne demande pas des dons, mais le Donateur lui-même.»

Vital Nlandu, votre curé-doyen

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