François, casseur de murailles…

Recherchant un lien entre les lectures de ce jour et la fête de saint François d’Assise, le patron de notre unité pastorale, j’ai été retenu par un passage de l’évangile qui renvoie sans conteste à l’actualité récente : Si vous aviez la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : « Déracine-toi et va te planter dans la mer », et il vous aurait obéi (Lc 17, 6).

Cette actualité récente n’est autre que la rencontre qui, du 18 au 20 septembre, a réuni à Assise environ 500 représentants des religions du monde entier. On comprend que le nom Soif de Paix ait été choisi en ces jours où nous vivons de manière tragique les frappes d’un terrorisme souvent associé aux religions.

Si vous aviez la foi, gros comme une graine de moutarde… Il a fallu assurément une grande foi, liée à une belle audace, au pape Jean-Paul II, lorsqu’il y a trente ans il invita des chefs religieux de toutes appartenances à se retrouver à Assise pour une prière commune en vue de la paix… Ce fut une première dans l’histoire multimillénaire de l’humanité !… En mesurons-nous toute la portée ? De toute manière, les grandes avancées de l’humanité (et de nos communautés…) ne se font jamais que modestement, dans l’obscurité, la patience… et aussi le sacrifice… Elles ne manifesteront leur fécondité qu’après avoir parcouru, à la manière des rivières souterraines, un long parcours invisible dans les cœurs, avec toutefois des résurgences qui viendront aux heures de Dieu comme des annonces et des invitations « à y croire envers et contre tout »… Ces rencontres d’Assise sont de ces résurgences annonciatrices… J’aime les accueillir comme des signes que Dieu nous fait après un 20ème siècle particulièrement meurtrier qui semble se renouveler tragiquement aujourd’hui…

Soif de Paix : thème de la rencontre d’Assise… Oui, nous avons plus que jamais soif de paix… Oui, notre monde est fatigué de toutes ces guerres… Oui nous éprouvons grande lassitude devant ces carnages incessants… Nous n’avons plus de voix devant ces enfants sacrifiés à l’autel des terrorismes de toutes sortes…

Que de murs, que de barrières, que de méfiances, qui enferment le monde dans la peur et la violence, non seulement à l’échelle des continents, mais aussi à la petite échelle de nos lieux de vie du quotidien…

François d’Assise nous a montré le chemin, lui qui d’année en année, tout au long de ses rencontres, fut un casseur de murailles entre les bien-pensants et les malandrins ; entre les gens de pouvoir et les pauvres ; entre les croyants et les infidèles ; entre les groupes humains paralysés par la peur de l’autre. (Gwénolé JEUSSET, Saint François et le sultan, Ed. Albin Michel, 2006, p. 39)… Savons-nous assez que tout a commencé pour lui, non de manière grandiose, mais dans un jour comme les autres lorsque dans la plaine d’Assise il osa donner le baiser à un lépreux ? … Ce fut la première muraille qu’il fit tomber…

Et nous-mêmes par quel lépreux que nous tenons à distance allons-nous commencer ?…

Nous ne pouvons célébrer notre eucharistie en vérité que si nous entrons dans la même démarche… de faire tomber une muraille !

Quel est le lépreux de ma famille, de mon voisinage, de ma communauté, de mon quartier, de ma ville, qui attend ce baiser de vérité ?…

Ne se trouverait-il pas chez moi aussi une résurgence que le Seigneur n’attend que de faire monter… depuis longtemps, peut-être ?

Si vous aviez la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : « Déracine-toi et va te planter dans la mer », et il vous aurait obéi (Lc 17, 6).

Votre Curé Henri Bastin

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