Homélie du 33ème dimanche ordinaire B : « Nous attendons ta venue dans la gloire«
Lectures : Dn 12, 1-3; Ps 15; He 10, 1114.18; Mc 13, 24-32
Chers amis, dans la page d’Evangile de ce dimanche, Jésus parle de sa venue. On sent le parfum de la fin de l’année liturgique, le parfum de l’Avent, le temps de l’attente et du désir de la venue du Seigneur. Jésus nous recommande d’être non seulement croyants, mais aussi voyants. Regardons le figuier : au printemps, cet arbrisseau est gorgé de sève, ses branches deviennent tendres, les bourgeons éclatent et il en sort des feuilles verdoyantes. Cela annonce la bonne saison, le temps de la renaissance après la rude épreuve de l’hiver. Certes, l’été n’est pas encore là, mais dès que nous voyons les feuilles du figuier sortir, nous disons : il est tout proche ! Le désir qui dévore le cœur du croyant détermine le calibre de l’accueil du Seigneur, comme le clame l’amoureuse du Cantique des Cantiques, qui guette l’arrivée de son bien-aimé : « J’étais endormie, mais mon cœur restait en éveil. J’entendis soudain la voix de mon bien-aimé ! Il frappe : ‘ouvre-moi ma sœur, mon amie, ma colombe, ma toute pure’ » (Ct 5, 2). Ainsi donc, si tu aspires à ouvrir la porte de ton cœur à Jésus, tu seras inscrit dans le Livre (1ère lecture) et tes péchés déjà pardonnés (2ème lecture) !
Pour évoquer la fin du monde, Jésus emploie un langage terrifiant : le soleil va s’éclipser, la lune pâlir, les étoiles s’écrouler et les puissances célestes s’ébranler. Il recourt aux images apocalyptiques répandues à son époque, décrivant les bouleversements cosmiques et des civilisations (Is 13, 10; Ez 32, 7-8; Jl 2, 10; 4, 15). Ces éléments cosmiques, idoles de l’ancien temps, vont disparaître pour l’émergence d’un nouveau monde… En temps de grandes crises, le thème de la fin du monde est le fonds de commerce des sectes et des illuminés qui menacent par leurs prophéties de malheur et de condamnation. Il n’en est pas moins vrai que ce thème suscite moult interrogations : la fin du monde dont il s’agit ne dépendrait-elle pas de la liberté de l’homme, que Dieu respecte ? Avec la disparition des espèces aujourd’hui, la biodiversité en péril, la dégradation de l’environnement, le réchauffement climatique dû aux 3 milliards de tonnes de CO2 concentrées dans l’atmosphère, le dégel des glaces polaires, les cyclones, les inondations, les réfugiés climatiques (comme en Alaska dans l’île de Kivalina qui est au risque d’être engloutie par les flots), le gouffre abyssal qui sépare les riches et les pauvres …, l’humanité, dans sa folie, n’est-elle pas en train de s’autodétruire ?
En tout cas, les premiers chrétiens croyaient que le retour du Seigneur dans sa gloire, sa parousie en grec, était imminent : il y en a qui s’en moquent, brocardent la foi à la parousie (2 Pi 3, 3-4 : « Jésus a promis de venir, n’est-ce pas, mais où est-t-il ? Depuis que nos pères sont morts, tout est resté dans le même état, comme à la création du monde !« ), d’autres encore arrêtent de travailler (2 Th 3, 10) ! Cependant, le Seigneur n’est pas venu physiquement. Et saint Pierre a tranché : le temps est tout à fait relatif pour Dieu, car il est atemporel. Pour Lui, mille ans c’est un jour, et un jour c’est mille ans (2 Pi 3, 8) ! C’est pour nous faire comprendre qu’on perd son temps à pronostiquer un avenir dont seul Dieu détient le secret ; on le gagne plutôt à reconnaître et à accueillir la présence aimante de Jésus aujourd’hui dans nos vies. Aussi prions-nous : « Marana tha » traduit « Viens, Seigneur » (1 Co 16, 22; Apoc 22, 20). A la messe, en proclamant qu’il est grand, fabuleux le mystère de la foi, nous disons : « Nous attendons ta venue dans la gloire« . Le rappel de la venue du Seigneur est un aiguillon qui nous invite à ne pas nous assoupir. L’important est de faire de chaque instant de sa vie une éternité et chaque jour comme s’il était le dernier (Gandhi). Pour saint Paul, il serait impertinent de se dérober du présent, plus tard, il sera trop tard : « C’est maintenant que le salut est proche » (Rm 13, 13). La foi n’est pas un savoir sur l’avenir, mais la confiance en la Parole de Dieu qui, dans l’espérance de la résurrection, nous promet de voir le jour de sa gloire.
Oui, l’espérance de la résurrection ! Chers amis, la 1ère lecture est un tournant de la foi d’Israël. La persécution d’Antiochus IV Epiphane (entre 167 et 164 av. J.-C.) qui décréta la fin du judaïsme, a poussé au martyr des milliers de juifs qui voulaient rester fidèles à leur foi. D’où cette question : comment Dieu peut-il abandonner à la mort éternelle tous ces courageux et intrépides fidèles morts pour lui ? C’est de là que naîtra cette conviction des croyants : « Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront« , car le juste ne meurt pas pour rien, Dieu ne peut le laisser dans les chaînes de la mort. Ce sont les premières expressions de foi des croyants à la résurrection. Le psalmiste renchérit en ces termes : « Mon cœur exulte, mon âme est en fête … Tu ne peux m’abandonner à la mort ni laisser ton ami voir la corruption » (Ps 15). Telle est notre espérance : avec Dieu, nous serons pour toujours (Jn 14, 3; 17, 24) !
Vital Nlandu, votre curé-doyen