Homélie du 23ème dimanche A :
Pour une Eglise cohérente avec ce qu’elle croit : une communauté fraternelle !
Lectures : Ez 33, 7-9;Ps 94; Rm 13, 8-10; Mt 18, 15-20
Chers amis, allons-nous écouter aujourd’hui la voix du Seigneur, ouvrir nos cœurs et nous laisser percuter par la Parole de Dieu ? (Ps 94). La page d’Evangile que nous venons de lire évoque en filigrane une Eglise-Peuple de Dieu qui soit une communauté fraternelle où chacun se sent être responsable de ses sœurs et de ses frères. Dans le livre de la Genèse, après que Caïn ait commis l’homicide sur son frère Abel par jalousie, Yahvé lui demanda : « Caïn, où est ton frère Abel ? » Il répondit : « Je n’en sais rien. Suis-je donc le gardien de mon frère ? » (Gn 4, 1-9). Bien-sûr que oui, tu es responsable de la vie des autres ! Antoine de Saint-Exupéry, in « Le petit prince », fait allusion à cette attitude responsable : « Les hommes ont oublié cette vérité, dit le renard. Mais tu ne dois pas l’oublier. Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé. Tu es responsable de ta rose« . Et pour reprendre l’expression du prophète Ezéchiel (1ère lecture), ta mission, c’est d’être « un guetteur », celui qui est à l’affût des signes d’espérance, qui reconnaît ce qui est fait de bien autour lui, il félicite, valorise. Mais c’est aussi le clairvoyant qui prévient le mal et avertit pour éviter les dégâts.
La péricope de Mathieu envisage en sus une Eglise qui soit une communauté de femmes et d’hommes d’horizons divers, certes, mais qui fait corps. Eclairés par la même Parole et nourris du même Pain, ils essaient de vivre une profonde communion de cœurs.
Cependant, Jésus ne plane pas, il n’a pas une vision utopiste du vivre ensemble. Il sait pertinemment que dans tout milieu de vie – familles, cercle d’amis, lieu de travail – bref, là où se télescopent différentes libertés, les malentendus et les frictions ne peuvent pas manquer… Et pourquoi ? Parce que nos fatigues, nos frustrations, nos blessures, nos susceptibilités, notre amour propre, notre éducation, notre parcours et même notre patrimoine génétique déteignent sur notre comportement. En fait, pour moi, le problème ne réside pas dans les conflits, mais dans la manière de les désamorcer. Quand les conflits adviennent, faut-il absolument recourir à la violence, fût-t-elle verbale, morale ou physique ? C’est ici que l’outil de désamorçage des conflits proposé par Jésus vient à point nommé: la graduelle correction fraternelle. Elle est basée sur le dialogue constructif et la conciliation. Le but, ce n’est rien d’autre qu’un frère à gagner ! Aussi, ne commence pas par l’accabler de censures. Au contraire, Jésus suggère : va le trouver seul à seul dans un entretien privé, discret et respectueux. S’il refuse de t’écouter, procède par la médiation bienveillante. Et fais-le dans la douceur et la patience, car chacun étant atteint de tout côté par la faiblesse, nous portons tous en nous une part cabossée… Si tu ne parviens pas à dénouer le nœud, il faut t’en référer à l’Eglise qui a la mission de lier et de délier, c’est-à-dire de proclamer le pardon de Dieu.
Chers amis, « S’il suffisait qu’on s’aime » chante Céline Dion; si chacun de nous pouvait seulement se rendre compte combien l’amour du Christ nous presse ! Se rendre compte combien on est tous redevables aux autres étant donné notre perpétuelle dette d’amour à leur payer. « Aime » dit saint Augustin, » et fais ce que tu veux« , car de la racine de l’amour vrai ne peut sortir que du bon, du beau ! Ainsi que l’écrit saint Paul : « L’amour ne fait rien de mal au prochain » (2ème lecture).
Pour finir, Jésus fait mention d’une Eglise qui soit une assemblée de prière. Il souligne l’importance et toute la puissance de la prière partagée, dite prière communautaire. Il agrée le choix que nous faisons d’aller prier à l’église; il bénit et encourage notre démarche de prier la Parole (lectio divina), de prier le rosaire en groupe de prière, de faire l’adoration avec les autres. La prière partagée est un vrai sacrement : Jésus, absent physiquement, y est spirituellement présent et sa présence est totalement opérante, agissante.
Vital Nlandu, votre curé-doyen