Homélie du 25 ème dimanche ord C : Etre habile pour les choses du Royaume
Am 8, 4-7; Ps 112; 1 Tm; Lc 16, 1-13
Mes sœurs et mes frères, en vagabondant à travers la Bible, nous voilà arrivés à cette parabole qui est pour le moins scandaleuse : un intendant magouilleur et intrigant encensé par le maître ! Comment est-ce que je la reçois ? En effet, pour nous aider à décoder l’irruption du Royaume dans notre vie présente, à repérer les semences d’espérance qui y fleurissent, et pour nous impliquer éventuellement dans leur déploiement, Jésus nous décrit de manière subtile une énigme autour de l’argent… Je vous avoue qu’en lisant cette parabole, j’ai souri en coin en me demandant comment j’allais m’en tirer à prêcher sur une leçon d’escroquerie !
Jésus choque et dérange certainement les bien-pensants. Certes, il n’approuve guère la fourberie, mais il admire la créativité de ce gérant qui ferait tout pour ne pas être pris au dépourvu ; il admire son habileté à se faire des amis, y compris avec l’argent malhonnête ! Et si, à notre tour, nous chrétiens, nous pouvions avoir de l’imagination à profusion pour optimaliser nos engagements au service du Royaume : comme par exemple rendre plus féconde notre spiritualité; être plus utiles aux autres, en l’occurrence aux plus faibles ; nous plonger davantage dans les profondeurs de l’Amour de Dieu; enjoliver nos relations interpersonnelles …! L’habileté n’est pas un vice, c’est plutôt savoir tirer profit de certaines circonstances de la vie pour atteindre certains objectifs.
Notre préoccupation à anticiper l’avènement du Royaume dans nos communautés de vie rend notre foi agissante et plus convaincante. Les saints qui se sont investis dans les œuvres d’assistance et de bienveillance, comme Mère Térésa, Vincent de Paul, ont fait preuve de beaucoup d’esprit d’imagination pour réussir leurs œuvres.
Quant à l’argent, pour Jésus, il n’y a pas de compromis : on ne saurait servir deux maîtres à la fois! Un jour il faut bien l’admettre, un jour il faut décider pour qui on veut vivre, à qui on veut se donner : à Mammon, l’idole Argent, le fétiche qui hypnotise, la fausse sécurité ou à Dieu ?
En effet, la question n’est pas de renoncer à l’argent ou de nous demander ce que nous faisons de l’argent qui est de toute évidence une commodité puisqu’ à bien des égards, il rend la vie facile, favorise le partage, suscite la joie de donner et de recevoir. Mais la question au demeurant pertinente, c’est plutôt celle de savoir ce que l’argent fait de nous ! Ses asservis, ses aliénés ? Nous connaissons le slogan du néo-libéralisme : travailler plus pour gagner plus ! Travailler éperdument au risque de galvauder la qualité de sa vie familiale (on n’a plus le temps d’être ensemble, de dialoguer, d’avoir des projets communs), de bousiller sa santé (burn-out, tension nerveuse), de sacrifier sa vie relationnelle. Aussi Jésus nous interpelle-t-il : « A quoi sert-il à un homme de gagner le monde entier si c’est pour ruiner sa propre vie ? « (Mt 16, 26). On devrait peut-être y penser souvent !… On est ainsi mis sous la pression de maximaliser le rendement, quitte à fouler au pied la dignité de l’homme, à exploiter sans scrupule le pauvre, à l’acheter pour une paire de sandales (1ère lecture). La formule « toujours plus » est devenue l’idéal de nos entreprises, de nos sports comme le business du foot, de nos loisirs … Et, malheureusement, elle nous plonge dans l’insatisfaction permanente. Ne serait-ce pas une des causes de nos inquiétudes ?
Voilà donc, chers amis, une proposition des objectifs à nous assigner en cette rentrée pastorale : il faudrait prioriser en nous accrochant à l’essentiel, avoir plus d’ambition et d’imagination dans les projets que nous allons entreprendre ensemble pour la gloire de Dieu et le salut des hommes.
Vital Nlandu, votre curé-doyen