Homélie 2ème dimanche de l’Avent B : L’Avent, un grand chantier !
Lectures : Is 40,1-11; Ps 84; 2 P 3, 8-14; Mc 1,1-8
Mes soeurs et mes frères, le psaume 84 commence par cet énoncé : « J’écoute : que dira le Seigneur« … Sa Parole est tellement efficace : elle bouleverse notre conscience, touche notre cœur. Elle nous fait quitter nos idées mortes en tenant notre esprit en éveil face à notre complaisance à la faiblesse et à la distraction quotidienne. On se fixe un temps de prière …, et on oublie; on prend des décisions, mais bâties sur du sable, de bonnes intentions qui ne passent jamais à l’acte… La Parole de Dieu est une Bonne Nouvelle qui nous (dé)montre l’attachement indéfectible de Dieu pour son peuple : « Consolez, consolez mon peuple » (1èrelecture). Autrement dit : apaisez, réconfortez celui qui est éprouvé ; celle qui est gagnée par le dégoût de vivre ; celui dont la santé se dégrade, dont les projets s’effondrent, dont la prière s’affadit ; celle qui se sent incomprise … Justement, c’est ce que font les soignants, les visiteurs des malades, les généreux bienfaiteurs, les bénévoles d’associations qui font reculer la misère … Leurs motivations bienveillantes ne font que refléter la tendresse du « Bon Dieu » !
Chers amis, la Bible nous ouvre de vastes horizons et nous aide à aller plus loin, rassurés que Dieu marche sur nos chemins, qu’il nous accompagne et nous habite. « Voici votre Dieu » (1ère lecture) : il vient à notre rencontre !… En Avent, nous nous préparons à cette venue. Selon la 2ème lecture, les premiers chrétiens commencent à se décourager : le retour tant attendu du Christ tarde à se réaliser. Pour calmer leur impatience, Pierre va relativiser le temps. Un peu comme les africains qui ont du temps par rapport aux européens pressés qui ont leur montre ! Pierre leur dira : « Pour le Seigneur, un seul jour est comme mille ans«
La venue du Seigneur est interprétée comme un temps de grâce, un temps nouveau. Ce qu’attendaient les chrétiens du temps de Pierre, d’après la promesse du Seigneur, est effectivement mon rêve ! C’est aussi le rêve de tout homme de bonne volonté : « une terre nouvelle où résidera la justice« . Un Monde où l’enfant est roi, où toute injustice subie par une personne faible lève la révolte, où tout être humain a accès à la dignité de tous et où Dieu est tout en tous.
L’on peut dès lors comprendre que la réalisation de la promesse de ce Monde nouveau n’est pas à reléguer à plus tard ou dans l’au-delà. Nous pouvons l’anticiper en collaborant à ce qui fait la joie de Dieu, c’est-à-dire le bonheur de l’homme (saint Iréné) et en étant responsable de sa vie et de celle des autres. Qu’est-ce donc anticiper ? « Ce n’est plus attendre, ne plus renvoyer le changement ; c’est accomplir dès maintenant ce qui sera réalisé demain, mettre en œuvre dès aujourd’hui des possibilités du temps messianique… Anticiper, c’est briser l’emprise de l’apathie et de la résignation » dixit le théologien protestant J. Moltmann. Partant, l’espérance chrétienne n’est pas une évasion hors de la réalité, mais un gage de la transformation de l’homme et de l’histoire, une démarche proactive. Tout ce que nous faisons aujourd’hui de bon, de beau, de noble, de grand, de vrai, de digne, de magnifique anticipe à coup sûr le Monde à venir. Le Royaume de Dieu est donc à la portée de nos mains tant qu’il y a des femmes et des hommes qui, même s’ils ne font pas « la une » des journaux, inventent, jour après jour, de nouvelles manières de vivre, de partager, de servir.

Quant à la page d’Evangile de ce week-end, en faisant écho à la première lecture, Jean le baptiste nous présente l’Avent comme « un grand chantier ». Il faut de gros engins (bulldozers, niveleuses …) pour préparer la route au Seigneur, qui vient dans nos cœurs jonchés de collines d’orgueil à aplanir. C’est ce qu’évoque ce témoignage du patriarche Athénagoras : » Il faut mener la guerre la plus dure contre soi-même. Il faut arriver à se désarmer. J’ai mené cette guerre pendant des années, elle a été terrible. Mais maintenant, je suis désarmé de la volonté d’avoir raison, de me justifier en disqualifiant les autres« … Le Seigneur qui vient dans nos cœurs bordés de ravins à combler : ce qui nous manque spirituellement, ce qui est petit en nous, comme notre foi appelée à grandir.
En effet, la foi, ce n’est pas se rappeler qu’on a été baptisé, confirmé, marié à l’église ; se rappeler que le curé a dit de bonnes choses dimanche dernier… C’est plutôt une immersion dans l’Esprit Saint, une conversion de cœur, un nouveau regard sur Dieu, sur soi-même, sur les autres et sur la création, bref, une manière de vivre. L’abbé Klemens Maria est surnommé l’apôtre de Vienne. Il aime les pauvres. Ça ne le gêne pas par exemple avec son chapeau, d’aller même dans les restaurants, récolter de l’argent pour les démunis. Un jour, dans un restaurant, il arrive devant un homme anticlérical, un athée qui haïssait farouchement l’Eglise et qui lui dit : « Tu oses me demander de l’argent ? » Il lui crache au visage ! Et tout calmement, l’abbé prend son mouchoir, s’essuie le visage et lui dit : « ça, c’est pour moi ! Et que réserves-tu, que donnes-tu à mes pauvres ? » Et l’homme impressionné s’est mis à pleurer. Il a remis à l’abbé tout ce qu’il avait dans sa poche. La foi de l’abbé Klemens, une manière de vivre !
Vital Nlandu, votre curé-doyen