Homélie du 13ème dimanche ordinaire : Se laisser toucher par Jésus-Christ
Lectures : Sg 1, 13-15; 2, 23-24; Ps 29; 2 Co 8, 7.9. 13-15; Mc 5, 21-43
Mes sœurs et mes frères, ce rendez-vous eucharistique nous donne de vivre ensemble un moment de sens et de foi. La 1ère lecture nous redit l’essentiel de cette foi : Dieu ne se réjouit pas de voir les êtres vivants mourir, mais plus encore, il n’a pas créé la mort. En effet, la mort physique est omniprésente, elle est tout à fait naturelle. Notre finitude biologique est inscrite dans nos gènes : un jour on naît, on devient enfant, adolescent, adulte ; et puis viennent la maturescence, la vieillesse, pour finir par la mort. Telle est notre destinée. Elle est entièrement normale, ordinaire puis-je dire, mais en même temps extra-ordinaire dans la mesure où notre vie, ta vie est elle-même une parabole, c’est-à-dire un chemin spirituel où l’on retrouve les traces du Ressuscité.
Elle est extra-ordinaire notre destinée, car grâce à la résurrection de Jésus-Christ, notre mort au demeurant inéluctable devient un « passage ». La mort, c’est comme un fleuve qui, avant d’entrer dans la mer, tremble de peur. Il regarde en arrière le chemin parcouru, depuis les vallées, les cascades, une longue route sinueuse traversant forêts et villes…, et subitement, que voit-il devant lui ? Un océan si immense qu’y pénétrer signifie à coup sûr, disparaître à jamais. Mais il n’y a pas d’autre moyen. Le fleuve ne peut pas revenir en arrière : c’est impossible. Le fleuve ne peut qu’entrer dans l’océan. Et c’est en s’y jetant que sa peur s’évanouit parce qu’il réalise alors qu’il ne disparaît pas dans l’océan, mais qu’il devient l’océan !
Chers amis, on se demande souvent si la vie a un sens. Oui, elle a un sens dès lors qu’on est utile aux autres; dès lors qu’on a un horizon, une espérance. L’espérance chrétienne est la certitude que notre avenir est en Dieu. Le psalmiste l’exprime en ces termes : « Seigneur mon Dieu, tu m’as fait remonter du monde des morts; j’avais un pied dans la tombe, mais tu m’as rendu la vie » (Ps 29, 4). En clair, Dieu n’a créé l’homme que pour la vie ; il lui a octroyé une existence impérissable. La foi au Christ est la source de cette vie qui triomphe de la mort. « Je ne meurs pas, j’entre dans la vie » (Thérèse de Lisieux).
Dans la page d’Evangile, Jésus guérit une femme d’un mal qui l’aurait inexorablement conduite à la mort. Saint Marc l’évangéliste souligne l’état désespéré de cette femme qui a « beaucoup » souffert; elle a eu de « nombreux » traitements; elle a tout dépensé sans aucune amélioration, hélas ! Dans le judaïsme, ce qui touche au sang est symbole d’impureté (Lév 15, 19-30). Voilà pourquoi elle touche à la dérobée (par derrière) la tunique de Jésus, pour ne pas le contaminer de son impureté et, surtout, ne pas être prise en flagrant délit de braver un interdit culturel. C’est comme si cette femme volait sa guérison. Mais quand Jésus lui dit : « Ta foi t’a sauvée« , il la lui restitue. Elle ne l’a pas ainsi volée, sa guérison, elle lui appartient à vrai dire! Si, par ailleurs, Jésus ne la repousse pas, c’est parce que quand il faut sauver une vie, tout ce qui est légalisme, tabou, peur, gène… ne compte plus.
Dans le 2ème miracle du récit évangélique, Jésus relève la fille de Jaïre du sommeil de la mort. Je suis admiratif de la foi de ce père qui espère contre toute espérance. D’entrée de jeu, il tombe aux pieds de Jésus, en signe d’humilité, d’adoration, d’abandon et de confiance. Oui, il y croit, malgré la déprime ambiante (« A quoi bon déranger le Maître« ), les pleurs et les grands cris annonçant la mort de l’enfant. Mais Jésus le rassure : « Ne crains pas, crois seulement « . La foi au Dieu de l’impossible – là où aucun moyen humain ne peut plus rien – est une issue positive au désespoir. Saisissant alors la main de l’enfant, il lui dit en araméen, sa langue maternelle : « Talitha koum » (« Jeune fille, lève-toi »)…
De ce qui précède, l’urgence qui est la nôtre est d’apprendre à apprécier la vie, de lutter avec audace et détermination contre les forces mortifères, de nous engager généreusement dans les actions en faveur de la vie (2ème lecture).
Dans ta prière de cœur, demande souvent à Jésus de te toucher par son Esprit. Ce toucher créateur transmet la vie, remet debout et guérit toute blessure. Etre vivant, n’est-ce pas être « branché » sur le Christ ?
Vital Nlandu, votre curé-doyen