Echarde de Paul et la tienne

                                Homélie du 14ème dimanche ord B : Echarde de Paul et la tienne

Ez 2, 2-5; Ps 122;  2 Co 12, 7-10; Mc 6, 1-6

Mes sœurs et mes frères, dimanche dernier nous avons eu le témoignage de foi de Jaïre au Dieu de l’impossible. Et après avoir relevé sa fille, Jésus a ordonné qu’on lui donne à manger. Si le vivant se nourrit de nourriture, le baptisé se nourrit de l’eucharistie. C’est la raison de notre présence en cette cathédrale où le Seigneur nous convie à la table de sa Parole et de celle du Pain de vie. Sauf qu’aujourd’hui, le décor change : nous passons du témoignage de la foi à l’incrédulité.

Dans la 1ère lecture, le prophète Ezéchiel est envoyé auprès d’un peuple rebelle qui se détourne de Dieu. Le même son de cloche retentit dans la page d’Evangile : Jésus lui-même semble voué à un cuisant échec dans son propre village. Il se heurte à l’incompréhension et au rejet des habitants de Nazareth qui refusent de le reconnaître comme le messie. Jésus le charpentier a dû travailler non seulement le bois, mais aussi les cœurs qui étaient plus durs que le bois ! Et pourtant, il ne s’en offusque pas, il respecte plutôt la liberté de chacun, en sachant du reste qu’il est difficile de discerner la présence de Dieu dans « l’ordinaire » de nos vies…

Comment ne pas penser aux acteurs pastoraux et aux prophètes d’aujourd’hui dont certains et je peux comprendre, se découragent face au nihilisme de notre société – les gens ne croient plus en rien !  Une société sécularisée, déchristianisée à ce point et qui, même si certains ne sont pas nécessairement rebelles à Dieu, vous avouent gentiment qu’ils n’en ont pas besoin. Dites-moi, comment faire boire un âne qui n’a pas soif ? Comment partager le don de la foi, transmettre à ses enfants, à ses petits-enfants un héritage spirituel dont ils se fichent ?

Chers amis, c’est dans ce monde postmoderne que Dieu nous envoie. Contre vents et marées, sans prosélytisme, mais avec respect, humilité et patience, continuons ainsi d’inventer l’annonce de l’Amour de Dieu, de proposer aux gens le « goûtez et voyez comme est bon le Seigneur » (Ps 33, 9).

Quant à la 2ème lecture, elle fait mention d’un coup de tonnerre, le scoop du grand apôtre saint Paul (il a eu des révélations extra-ordinaires), qui fait une confession publique : pour l’empêcher de ne pas se surestimer, il a reçu une gifle, c’est-à-dire il a été ridiculisé par un acolyte de Satan, qui lui a infligé une écharde dans sa chair, pour le blesser de l’intérieur ! On a beaucoup épilogué sur cette métaphore énigmatique d’écharde de saint Paul, la vulnérabilité, l’objet d’opprobre et de honte qui le rongeait du dedans. Serait-ce une maladie physique (psoriasis, épilepsie …), une souffrance psychique (tendance dépressive …), spirituelle (orgueil…) ? Paul en a pleuré, il a prié avec insistance sans jamais en être débarrassé ! Oui, c’est une vraie leçon qui nous indique où aller puiser nos forces, au lieu de baisser les bras : non pas dans nos mérites, nos ressources et moyens, mais figurez-vous, dans nos faiblesses. Elles nous permettent d’être humbles et de nous en remettre totalement à Dieu.

Nous avons tous une écharde dans notre chair, cette blessure cachée dont le poids pèse lourd sur la conscience (complexes, manque cruel d’amour, de tendresse, de valorisation et de reconnaissance…). Mais saint Paul en est sorti grandi, car Dieu a agi à travers ses faiblesses. Nous savons maintenant que la puissance de la Miséricorde se déploie quand nous sommes faibles. C’est tout le paradoxe : « Je suis fort quand je suis faible« .

Un paradoxe qui nous exhorte, afin de modérer nos prétentions, de faire de l’humilité notre règle d’or. Le Curé d’Ars le dit en ces termes : « Je suis seulement ce que je suis, et seulement cela« . Aussi je me laisse apaiser par cette merveilleuse assurance du Bon Dieu : « Ma grâce te suffit !« 

                                                                                   Vital Nlandu, votre curé-doyen

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2 commentaires pour Echarde de Paul et la tienne

  1. Philippe Denomerenge dit :

    Merci Père, c’est Super bien dit, nous ne serons jamais assez humbles ! Bonne journée à vous ! Que Dieu vous bénisse !!!

    Philippe ________________________________

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  2. Anne-Elisabeth dit :

    Superbe homélie stimulante, cher Monsieur le Doyen, merci beaucoup !

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