Transfiguration ou Révélation

Homélie du 2ème dimanche de Carême C : Transfiguration ou Révélation

Lectures : Gn 15, 5-18 ; Ps 26 ; Ph 3, 17-4, 1 ; Lc 9, 28b-36

Mes frères et sœurs, dans la 1ère lecture, Yahvé fait alliance avec Abraham qui n’a pas d’enfant. Dans une merveilleuse poésie, il lui dit : « Regarde vers le ciel étoilé, contemple la création, compte les étoiles si tu peux … Telle sera ta descendance !« .  Abraham n’a pas de garantie matérielle que cela se réalisera, il fait seulement confiance et il a eu raison ! Le nom « Abraham » signifie père d’une multitude ! En effet, les fidèles des 3 grandes religions monothéistes de la planète, à savoir les juifs, les chrétiens et les musulmans, se réclament tous d’Abraham, le Père des croyants.

Pour célébrer cette alliance, Abraham applique un rite en vogue chez les hébreux à son époque : on découpe des animaux en 2 parts, en plaçant chaque moitié l’une en face de l’autre. Se tenant la main, les 2 partenaires qui font alliance passent entre les pièces découpées en jurant : « Qu’on me coupe en deux comme ces animaux, si je trahis le pacte ! » Au coucher du soleil, Yahvé passa, mais seul, entre les morceaux d’animaux sous forme d’un brasier, d’une torche enflammée. Ainsi conclut-il l’alliance avec Abraham…  De même, par le baptême et dans le sang de Jésus le Christ, le Dieu Trinitaire a scellé avec toi une alliance gravée dans l’amour. Tu lui appartiens éternellement ! Amen !

A son tour, avant de sceller, par son sang, l’alliance nouvelle et éternelle entre Dieu et l’humanité, Jésus savait que le drame qui l’attendait,  allait certainement dérouter, déstabiliser ses disciples. Je renvoie ici aux disciples d’Emmaüs tout à fait désappointés : « Nous, on croyait que c’était lui le messie, hélas ! »

Alors, pour les rassurer, Jésus va leur révéler la gloire qui l’attend, la gloire qui vient, qui nous attend … question de les faire saliver ! Ce flash, c’est pour que les disciples comprennent dorénavant que la vie n’a jamais dit son dernier mot. La mort n’est qu’un passage et qu’au bout du tunnel, il y a la plénitude de lumière, de vie et d’amour, bref il y a la gloire. C’est de cette gloire dont parle saint Jean : « Nous avons vu sa gloire (sur le mont Thabor) » (Jn 1,4); « Père, donne-moi la gloire que j’avais auprès de toi ; je veux que mes amis contemplent ma gloire« (Jn17, 24). La gloire dont parle saint Paul : « J’estime en effet que les souffrances du temps présent ne sont nullement à comparer à la gloire qui va se révéler! » (Rm 8, 18)…
C’est elle qui fonde notre espérance ! En tout cas, c’est un rêve auquel j’aspire de tout mon cœur !

Jésus choisit  le même trio, c’est-à-dire Pierre, Jacques et Jean, les trois mêmes qu’il choisira pour l’accompagner au Jardin de son agonie, à Gethsémani. Et là, il fut transfiguré à leurs yeux, son visage se couvrit de l’habit de Dieu, à savoir la lumière. Et qui apparaît ? Les 2 colonnes de l’Ancien Testament,  Moïse et Elie, pour signifier que c’est lui, le Christ, qui éclaire et accomplit l’enseignement de Moïse (Tables de la loi), l’enseignement des prophètes représentés par Elie.

Epris d’un sentiment océanique (sentiment de plénitude et de fusion à quelque chose qui nous dépasse), le cœur bondissant, Pierre s’extasie !  Il propose de construire 3 tentes dans ce jardin de délices, pour qu’ils y demeurent à jamais.

A ce moment, d’une nuée, Dieu va se manifester en confirmant la nature divine de Jésus comme au jour de son baptême : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le !« . Les 3 disciples-missionnaires ont rendu témoignage de cet événement inédit aux autres disciples et à des milliards de personnes à travers les siècles. La voix, atteste saint Pierre,  ils l’ont effectivement entendue : « Nous avons entendu nous-mêmes cette voix qui venait du ciel, lorsque nous étions avec Lui sur la montagne sainte » (2 P 1, 18) !

Sauf que sa demande n’a pas été exaucée ! Pourquoi ? Parce que ta vie continue et à ras de terre, il faut boire la coupe jusqu’à la lie. Aussi, une fois irradié du soleil de Dieu sur la montagne sainte (tes moments d’adoration, de communion avec le Dieu Trinitaire), il convient de redescendre dans la vallée pour transmettre la lumière que tu as accumulée. Redescendre dans la vallée où bat le pouls de l’histoire. C’est là, avec tes doutes, tes balbutiements, tes questionnements, tes révoltes, tes frustrations, tes échecs, tes réussites, que tu es appelé à être un ferment au secret de la pâte du monde. C’est là, dans ton biotope, que tu vas continuer à t’émerveiller des signes que la vie t’envoie, bref que tu dois à ton tour transfigurer ton quotidien.

Tu y découvriras en chaque personne, par ton regard rempli de bienveillance, la part de lumière qui est la sienne. La vraie spiritualité, n’est-ce pas celle qui reconnaît la lumière divine qui brille en tout homme ?

                                                                              Vital Nlandu, votre curé-doyen

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