Homélie du 34ème dimanche ord C : la fête du Christ-Roi de l’Univers
Lectures : 2 Sam 5, 1-3; Ps 121; Col 1, 12-20; Lc 23, 35-43
Chers amis, les arbres perdent leurs feuilles, les jours s’assombrissent, les gelées sont présentes; les gants, les écharpes, les bonnets et les manteaux sont sortis des garde-robes … L’ambiance des fêtes de fin d’année se fait déjà sentir! C’est dans ce climat que nous célébrons en ce dernier dimanche de l’année liturgique C, la solennité du Christ-Roi de l’Univers créée par le pape Pie XI en 1925.
Cependant, on peut se demander à juste titre : pourquoi la solennité de Christ-Roi de l’Univers sert-elle d’apothéose ou encore de point d’orgue à une année liturgique ? C’est parce qu’elle fait la synthèse du mystère du salut : Jésus-Christ, l’Alpha et l’Oméga, « Celui qui est, qui était et qui vient » (Ap 1, 8), a pris place ! Il règne désormais dans les cœurs de ceux qui acceptent son Amour. Alléluia, amen ! Sa royauté n’a pas de consonance politique, il est un « Roi de cœur » qui, loin de tout apparat, se propose d’instaurer dans nos cœurs, dans nos maisons, dans notre UP, nos lieux de vie et de travail, son règne d’amour, tout entier bâti sur l’humilité, la paix, bienveillance, la confiance et le service… Et c’est éternellement que cette Royauté est inscrite dans le plan de Dieu.
Selon la page d’Evangile de ce dimanche, à la crucifixion, le peuple assiste à la scène, il se tient là à observer. A quoi pensent-ils donc, ces spectateurs silencieux ? Il y en a qui, sans doute, tout pantois, cherchent à comprendre – oui, parfois à défaut de comprendre, on apprend ! D’autres sont peut-être empathiques, indignés … Savent-ils seulement que c’est Dieu qui est rejeté ? « Celui qui est Parole est venu chez les siens, mais il n’a pas été accueilli » (Jn 1, 11). Savent-ils seulement qu’en ce moment se joue le salut des hommes et du monde ? « Aujourd’hui, avec moi tu es dans le Paradis » dit Jésus au bon larron, l’homme qui se sait coupable et qui, comme l’enfant prodigue, s’ouvre à la grâce… L’aujourd’hui du salut, c’est la Bonne Nouvelle de l’ange à la naissance de Jésus : « Aujourd’hui nous est né un enfant sauveur » (Lc 2, 10-11). C’est le sens prophétique que Jésus lui-même, l’Oint du Seigneur, assigne à sa mission : il est venu pour libérer, dès aujourd’hui, les captifs de toutes les chaînes et oppressions, de tous les esclavages (Lc 4, 16-21). C’est cette puissance de délivrance qui s’est opérée chez Zachée : « Aujourd’hui le salut est entré dans cette maison » (Lc 19, 9).
Quant à eux, les chefs, les soldats et le mauvais larron tournent Jésus en dérision, le prenant pour un imposteur : « Sauve-toi toi-même, toi qui prétends sauver les autres« . En effet, nous connaissons le vieil argument du monde au procès de Dieu : si Dieu existe, pourquoi ne fait-il pas prévaloir la vigueur de sa puissance triomphante, pourquoi la souffrance des innocents et tout le mystère du mal ? Les interpellations adressées à Jésus sur la croix nous rappellent textuellement les tentations qu’il a dû affronter au désert : « Si tu es le Fils de de Dieu …! » (Lc 3, 3 s). Mais il ne répond pas aux sarcasmes de ceux qui le narguent. Il n’est pas venu supprimer ni expliquer la souffrance des hommes, mais les accompagner et les habiter sur leurs chemins de croix.
« Souviens-toi de moi » lâche le bon larron. Oui, chaque fois que tu plonges dans le cafard de la solitude, que tu te sens abandonné; chaque fois que tu es dans le brouillard du doute, de l’épuisement, de la peur, de la maladie, de l’absurdité, dans la foi et la communion avec Jésus-Christ en croix, prie simplement : « Jésus – qui signifie Dieu sauve -, souviens-toi de moi!« , c’est-à-dire « garde une part de moi en toi, dans l’intimité de ton cœur ! » A ce moment, tu vivras l’aujourd’hui du salut de Dieu : avec Jésus, tu seras !
Chers amis, « Opportet Illum regnare » (Il faut qu’il règne, notre Jésus). Pourquoi aller à la messe du Christ Roi de l’Univers, Roi de cœur, si ce n’est pas pour s’engager à contribuer à l’extension de son règne autour de nous et partout où on cherche du sens. Etre partenaire et héritier du Royaume, c’est in fine être témoin de l’amour vrai, être passionné et dévoué pour l’être humain et respectueux de la nature.
A l’aube de l’Avent, moi je choisis Jésus-Christ comme ami et Roi de cœur : dans l’espérance, il me mène sur le chemin de l’alliance et de la rencontre ; au-delà des voiles et des apparences, je tâcherai ainsi de porter un regard bienveillant sur tout visage humain que je croise sur ma route, un regard de respect, d’admiration et de gratitude vis-à-vis de la nature. Notre Père, « Que ton règne vienne ! »
Vital Nlandu, votre curé-doyen